lundi 10 avril 2017

La République en mode Start up



Depuis un peu plus de 30 ans, année après année, d’élections en élections, la société se désole et grogne son mécontentement. Le chômage plus que tout la ronge à mesure que des politiques impuissants promettent d’y porter les remèdes puisés dans les arsenaux décrépis d’un monde disparu. Le choc du réalisme, en 83, l’abasourdit. Les cohabitations successives la déstabilisent. Elle lance un grand cri d’alerte en 2002. Le Président élu l’aura peut-être mal entendu. Avait-il les moyens de réduire la fracture sociale qu’il dénonçait ?
Y pouvait-il quelque chose ?

La société, les gens, les personnes, les citoyens, le corps électoral, le peuple, bonnes filles et bon garçons de la République, essaient alors Nicolas Sarkozy, vite confronté à La crise financière mondiale. Le monde bouge. Ils tentent ensuite François Hollande, décidé à des avancées sociales démocrates, pourtant élu sur un « mon ennemi, c’est la finance » et sur des « moi Président ».
Normal ?
Il y avait encore – croyait-on – plus à perdre qu’à gagner.
Mais ces deux là y pouvaient-ils à leur tour quelque chose, empêtrés qu’ils étaient dans des rouages exécutifs, législatifs et politiques grippés et renâclant ?

Deux courts quinquennats plus tard, le chômage continue de croitre. La précarité s’installe à mesure que l’imparable mondialisation s’impose et que la révolution digitale façonne le nouveau « nouveau monde ». La jeunesse s’impatiente et l’éducation piétine. La moitié des métiers de dans 20 ans sont inconnus, dans leur nature et dans leur forme. La peur née de l’incertitude et de la menace terroriste sourd.
La confiance est bigrement écornée, entre le peuple et les gouvernants de tout poil qui s’imaginent encore être ses élites. La « normalisation » du personnel politique ne plait pas.
La séparation de corps était largement engagée.
Le divorce est consommé.

Mai 2017.
Pour la première fois depuis bien longtemps une majorité de français semble avoir décidé de passer à l’acter et renverser la table. Elle a compris que la crise financière, bien réelle, n’était plus un alibi acceptable. Les peuples du monde en s’emparant de la révolution technologique entament une mutation historique. Et comme chaque fois que l’on vit l’histoire, on ne le sait pas.

Alors, les français s’emparent des primaires, étranges OGM de l’élection présidentielle, pour éliminer sans férir les caciques depuis trop longtemps dans le paysage.
Exit Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, François Hollande, Manuel Vals et consorts.
Strike !
On veut autre chose, fut ce le pire, mais du nouveau !
Haro sur les promesses de rassemblement inaudibles qui mènent à la bouillie politicienne. On ne garde de ce premier faux avant-tour que François Fillon et Benoit Hamon, qui présentent les programmes les plus lisibles et plutôt radicaux. Ils semblent aujourd’hui bien distancés.
Se dessine un projet d’hémicycle imprévu où les extrêmes s’installent, où les vieux partis se désintègrent et où surgit un OVNI politique incarnant le désir de plonger avec des tètes nouvelles dans un monde à inventer.
Bulle ? Pas si sur.
L’incroyable Brexit est acté. Le surprenant Monsieur Trump est bien Président des Etats unis. Le populisme rampant séduit. Tout est possible.
Quelle histoire !

Si l’on en croit les sondages - ils se font bien têtus, même si toute surprise reste possible, tant les stratégies de l’électeur sont insondables - des intentions encore fragiles, telles les premières fleurs des arbres fruitiers, pencheraient vers un jeune startuper décidé, semble-t-il, à inventer ce nouveau « modèle », comme on dit chez les pigeons et les licornes. Les attentes de la société envers la politique ont évidemment changé. Ils réclament une autre gouvernance, imprégnée de démocratie directe et participative, ouvrant le débat public et reconnaissant les initiatives citoyennes, pour redonner aux citoyens le pouvoir d’accomplir leur destin.

La République est en mode « Start up ». quoiqu’il arrive, on va inventer et tâtonner, qu’on de le dise, hors les structures convenues du paysage politique. Et de droite, et de gauche. Le mouvement « En marche » est parti sur une intuition qui ne demande qu’à se transformer en vision, en organisation, et peut être en succès. Comme une « jeune pousse », née avec l’appui quasi « familial » du premier cercle, qu’ont rejoint quelques « political angels » avec enthousiasme. Il faudra peut-être plusieurs « tours » successifs pour aboutir à une certaine forme de stabilité.
Il règne un parfum d’automne-hiver 57/58.

Mais attention, Danger !
De la même manière qu’un vieil industriel, sympathique et généreux, mais décalé, peut ruiner les espérances d’un jeune entrepreneur, les inusables routiers des congrès et de l’assemblée peuvent hypothéquer les ambitions de l’innovateur.


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